eau aquassay © Sabine Delcour
La start-up Aquassay, à Limoges, accompagne les industriels et les collectivités dans leur stratégie de gestion et d’économie de l’eau. Ses diagnostics et solutions servent aussi les intérêts de l’agriculture dans un contexte où les restrictions d’eau se multiplient d’année en année.
« L’eau est épuisable, altérable et très coûteuse. Sa qualité se dégrade, les épisodes de sécheresse se multiplient et s’allongent alors que les usages augmentent. La situation ne pourra pas durer indéfiniment. » Jean-Emmanuel Gilbert, expert en gestion de l’eau, joue les Cassandre depuis la création d’Aquassay, fondée avec son homonyme Stéphane Gilbert, docteur en chimie spécialisé en environnement. Mais son discours, qui avait du mal à se faire entendre hier, coule de source aujourd’hui, car l’urgence est déclarée. L’entreprise a mis au point un dispositif qui analyse le parcours de l’eau des sites industriels, publics ou agricoles. Celui-ci permet d’identifier et de quantifier tous leurs points d’amélioration et de risque, et de préconiser ensuite des plans d’action pour réduire les consommations et les rejets. « Grâce aux cartographies que nous mettons en place, nous constatons que certaines installations sont de véritables passoires hydriques, souligne le dirigeant. De même, il n’existe pas de tri sélectif des effluents des eaux usées qui permettrait, là aussi, d’obtenir des économies substantielles. »
Arroser en fonction du degré d’humidité des sols
Aquassay propose donc une remise à plat de la configuration de la gestion de l’eau, avec des préconisations d’amélioration de ses usages. « En fait, il ne suffit plus de faire mieux, il faut faire autrement », résume Stéphane Gilbert. Les industriels, qui risquent régulièrement des arrêts d’activité par ordre préfectoral, notamment en période d’étiage, ont été les premiers à solliciter la start-up. Les collectivités ont suivi et un groupe de réflexion a été mis en place incluant le secteur de l’agriculture. Une action identifiée a notamment débouché au sein d’une exploitation sur un arrosage raisonné en fonction du degré d’humidité des sols. L’investissement, de l’ordre de 2 000 euros, a permis une réduction des consommations d’eau de 30 %.
L’eau ce bien si précieux
La Région Nouvelle-Aquitaine devrait être particulièrement impactée en matière d’eau par les effets du changement climatique. La diminution potentielle de la recharge de ses nappes phréatiques pourrait atteindre 30 à 50 % et faire baisser les débits moyens de 20 à 30 % à l’horizon 2030*. De plus, un tiers des masses d’eaux souterraines est actuellement en mauvais état chimique en raison notamment de pollutions par les nitrates et les pesticides. Or, ces nappes fournissent 80 % de l’eau potable de la région, ce qui nécessite des traitements coûteux. Aussi, malgré la diversité des ressources disponibles sur le territoire grâce à un maillage de cours d’eau, nappes, étangs et zones humides, la situation devient inquiétante. Surtout lorsque l’on sait qu’en 2015, 1,5 milliard de mètres cubes ont été prélevés en Nouvelle-Aquitaine.
Consciente de la situation et après concertation avec tous les acteurs concernés (chercheurs, collectivités, socioprofessionnels, gestionnaires d’espaces, agences de l’eau…), la Région déploie à travers un programme de 42 actions une stratégie de préservation de l’eau : gestion intégrée des ressources en eau à l’échelle des bassins, recherche de solutions innovantes, changement de pratiques des usages de l’eau… Sans eau, point d’agriculture. Les activités de cette dernière pèsent bien sûr, entre autres, sur le prélèvement et la qualité des eaux. C’est pourquoi la transition de l’agriculture doit s’attacher à fortement réduire l’impact des productions sur cette ressource. Et ce, aussi bien sur la qualité -en s’engageant dans la sortie des pesticides et la réduction des engrais chimiques, en préservant les haies et les prairies – que sur la quantité – en optimisant l’utilisation de l’eau, en favorisant les économies ou en restaurant la matière organique des sols (ce qui accroît leur capacité de rétention).
* Que ce soit dans les cours d’eau (notamment en Dordogne, Lot-et-Garonne, Landes, Charente, Gironde et Corrèze) ou les nappes d’eaux souterraines connectées avec la surface (Charente, Lot-et-Garonne, Dordogne).